Gerry Taama offre des lampadaires à des villages de l'intérieur du Togo

Au Togo, «un seul lampadaire peut faire renaître tout un village»

Au Togo, un député de l’opposition a décidé de pallier l’absence d’électricité dans les villages à l’intérieur du pays en installant, à ses frais et avec l’aide de mécènes de son parti, des lampadaires à énergie solaire. Une initiative saluée par les habitants mais qui lui vaut des critiques de la part de ses adversaires politiques.

Que la lumière soit dans les villages du Togo! En installant des lampadaires à énergie solaire dans des villages dépourvus d’électricité, le député Gerry Taama entend traduire le verset de la Genèse en véritable projet social.

Nous sommes le 9 mai 2021. Ce jour-là, Gerry Taama se rend au village d’Abinga, dans la préfecture de l’Est Mono, au centre du Togo. C’est là qu’il avait fait installer, quelques jours auparavant, 5 lampadaires solaires (sur la place publique, à l’endroit où s’anime le petit marché du village et au sein de l’école primaire publique du village).

Aujourd’hui, il vient constater le résultat et vérifier que les dispositifs sont fonctionnels.

À l’entrée du village, il est accueilli par des dizaines de villageois tout contents. À leur tête, Toyiba Koula, le chef du village d’Abinga.

«Nous sommes heureux de voir la lumière. C’est une très bonne initiative. Nos élèves vont pouvoir continuer d’apprendre la nuit et nous pouvons organiser des activités publiques la nuit. Si le député peut installer un de plus, pour éclairer la cour royale [la cour du chef du village, qui accueille souvent des réunions publiques et où les litiges entre villageois sont réglés, nldr], ce serait formidable » s’est-il réjoui au micro de Sputnik.

                                       Une capture d’écran des photos publiées par le députés sur sa page facebook

Pour mener à bien ce projet, Gerry Taama affirme investir la quasi-totalité de ce qu’il gagne à l’Assemblée nationale depuis le début du projet, en septembre 2020. Le tout «avec l’appui de quelques mécènes du parti» car bien entendu, son seul salaire de député (environ 1.985 euros) ne lui aurait pas permis de faire l’acquisition de cette cinquantaine de lampadaires qu’il a fait installér dans différents villages du pays.

«Chaque lampadaire posé est équipé de lampes solaires d’une puissance totale de 300 volts pouvant éclairer l’équivalent d’un terrain de football, le tout pour un coût total minimum de 400.000 FCFA» (soit 611 euros), détaille Gerry Taama.

Un enfant du village

Interrogé sur le sens de cette initiative, le député de 46 ans explique qu’il a grandi dans un village sans électricité, où il «apprenait avec une lampe à tempête» et qu’il est certain qu’«un village peut renaître rien qu’avec un lampadaire».

«Je pense à l’amélioration des conditions d’études des enfants mais aussi à une naissance des activités commerciales de nuit», espère Gerry Taama.

Avec ces lampes, poursuit-il, les élèves peuvent «continuer à réviser leur leçon la nuit. Les petits marchés peuvent s’animer aussi à proximité de ces lampadaires».

Il affirme être motivé par l’amélioration du bien-être des populations dans ces villages, qui «vivent dans une précarité assez inquiétante: manque d’eau, d’électricité, de route».

«Notre objectif est de faire revivre ces villages et changer le vécu quotidien de leurs populations», ajoute-t-il.

«Dix lampadaires ne font pas le développement»

Taama (bleu) et bénéficiaires sous un des lampadaires

Quoique l’initiative du député togolais Gerry Taama, candidat malheureux à la présidentielle au Togo deux fois de suite (en 2015 et 2021), suscite l’admiration dans les villages, elle lui vaut parfois des critiques de la part de ses adversaires politiques.

Le 8 mai, le député togolais annonçait sur sa page Facebook la réception d’une dizaine de lampadaires au profit des villages de la préfecture de la Kozah (nord-Togo), d’où est originaire le Président Faure Gnassingbé.

Deux jours plus tard, il était taclé par un membre du gouvernement togolais, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, Ihou Watéba.

«Lorsqu’on fait des gestes en faveur des populations, on n’a pas besoin de les claironner», a-t-il déclaré sur un média local, avant d’ironiser en ajoutant: «10 lampadaires ne font pas le développement».

«Ce sont des petits ruisseaux qui font les grandes rivière», lui a répondu Taama du tac-au-tac dans une longue publication sur sa page Facebook.

Au Togo, le taux d’électrification était estimé à 50% en fin d’année 2020. Plusieurs villages non reliés au réseau, à l’exemple de certains concernés par le projet du député togolais, sont néanmoins traversés par des fils électriques de moyenne tension.

Le gouvernement togolais s’est donné pour objectif de porter ce taux à 75% à l’horizon 2025, puis à 100% entre 2026 et 2030 à travers plusieurs projets.

On peut citer notamment le programme CIZO (qui veut dire «allumer la lampe» en ewé, une langue locale du sud du Togo). Son objectif est d’éclairer 300.000 foyers à l’horizon 2022, en leur fournissant des kits solaires à prix abordable.

Une centrale photovoltaïque, prévue à Blitta (à 262 km de Lomé), fournirait de l’électricité à 600 000 foyers ainsi qu’à 700 petites et moyennes entreprises (PME).

Un dernier projet a vu le jour en avril dernier. Lors de la visite du chef de l’État togolais, Faure Gnassingbé, à Paris, un accord a été signé avec Sunna Design, une entreprise française spécialisée dans l’éclairage public solaire et autonome, pour déployer dans les mois à venir 50.000 lampadaires de ce type dans les campagnes reculées du pays.

 

Par Alphonse LOGO (Source: fr.sputniknews.africa)

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