Mise en examen confirmée pour Bolloré et coaccusés dans l'affaire de corruption au Togo

Réactions à Lomé après la mise en examen confirmée de Vincent Bolloré pour Corruption au Togo

Le rejet mardi dernier par la cour d’appel de Paris, de la requête en nullité de l’homme d’affaire français Vincent Bolloré mis en examen depuis 2018 pour corruption d’agent public étranger, (corruption notamment dans l’attribution de la gestion du port de Lomé (Togo)) réjouit dans les rangs de l’opposition et de la société civile togolaise.

Mardi 21 mars 2023, la cour d’appel de Paris a en effet annulé une partie des pièces de l’enquête sur l’attribution entre 2009 et 2011 de la gestion du port de Lomé, mais a confirmé sa mise en examen pour corruption.

Les juges d’instruction du pôle financier du tribunal de Paris, enquêtent depuis 2013, sur le soupçon du groupe Bolloré d’avoir utilisé les activités de conseil politique de sa filiale Euro RSCG – devenue Havas – pour décrocher frauduleusement la gestion des ports de Lomé et de Conakry (Guinée), au bénéfice d’une autre de ses filiales, Bolloré Africa Logistics, anciennement appelée SDV. Le cas guinéen a été écarté en 2019 pour cause de prescription. Mais désormais Vincent Bolloré et deux autres responsables de son groupe devront répondre pour les accusations portées contre eux au correctionnel.

Une victoire d’étape

A Lomé, plusieurs acteurs interrogés par Anadolu se félicitent de la nouvelle. C’est le cas de Gerard Adja, l’un des leaders de la Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK). Un parti politique dont le président Kodjo Agbéyomé en exil depuis la présidentielle de février 2020 et l’actuelle coordinatrice Brigitte Adjamagbo Johnson, se sont constitués parties civiles dans cette affaire.

« Cette confirmation est une victoire d’étape pour nous car, le mis en cause avait cherché à éviter le procès en correctionnel en négociant avec le tribunal le plaidé coupable, ce qui devrait lui permette de s’en sortir en payant une somme par entente et évoluer en toute liberté après avoir créé du désastre dans notre pays par ses pratiques mafieuses et indélicates. Nous continuons par compter sur l’indépendance des juges en France pour mener à bout cette affaire avec toute la transparence qui se doit. » a-t-il soutenu

Gerard Adja croit que « les répercussions de ce procès s’il aboutissait à une culpabilité de l’inculpé » pourrait « nécessairement avoir des conséquences d’ordre politique » au Togo.

Pour Me Claude Amega, avocat et Président du collectif des associations de lutte contre l’impunité et la corruption (CACIT-Togo), « c’est un joie » d’apprendre cette nouvelle.

« Vous savez, les plus grands maux qui gangrènent la société togolaise aujourd’hui, c’est la corruption et l’impunité. Et lorsqu’un contrat d’investissement reste un secret d’état, sans information disponible, et qu’il se révèle par la suite, entaché de soupçons d’acte de corruption, il est important pour moi en tant que défenseur des droits de l’homme d’y voir clair » a-t-il déclaré.

Me Amega se dit également heureux de constater que les infractions qu’on ne peut pas poursuivre » au Togo, ou qu’il n’y a pas la volonté de poursuivre peuvent l’être ailleurs.

« Maintenant, c’est une question de justice. S’il se fait qu’il est reconnu coupable à la fin, nous souhaitons que tous ceux sont à la cause dans cette affaire soient alors sanctionnés » a ajouté l’avocat togolais.

Un indice qui rassure

Pour d’autres, c’est une décision qui rassure, du fait que la justice ira jusqu’au bout dans cette affaire. C’est le cas de Dr Emmanuel Sogadji, président de la ligue togolaise des consommateurs.

« La confirmation de cette mise en examen est en réalité un indice qui peut rassurer que les juges ne dorment pas sur le dossier. Mais l’essentiel pour les citoyens togolais ou nos organisations citoyennes est d’espérer un procès équitable et juste sans aucune main invisible » a dit Sogadji.

Tout en se réjouissant également de la nouvelle, Pasteur Edoh Komi, le Président du Mouvement Martin Luther King, la voix des sans voix, veut aussi voir la justice aller jusqu’au bout dans cette affaire de corruption d’agent public étranger au Togo.

 « Si Bolloré et ses co-accusés sont coupables, qu’ils soient alors sanctionnés afin que cela décourage d’autres investisseurs, qui pensent qu’ils peuvent simplement venir corrompre nos dirigeants, brader l’économie nationale d’un pays pour en retour œuvrer pour leur maintien au pouvoir contre le gré de toute une population » soutient le pasteur défenseur des droits de l’homme.

Il espère d’ailleurs que la justice togolaise prendra le pas pour ouvrir également une enquête parallèle sur cette affaire.

Enfin, Nicolas Lawson, économiste et politicien togolais, affirme à Anadolu qu’au-delà de la corruption, c’est de la prédation dont il s’agit dans cette affaire.

Il n’a jamais été d’accord que le groupe Bolloré facture dans ce contrat, à 300 milliards de Fcfa, la construction d’un quai au Port Autonome de Lomé.

« D’après les experts qui ont fait le même travail au Singapour, le Togo ne devrait pas débourser plus de 86 milliards de Fcfa pour ce travail » assure-t-il.

A noter que toutes les tentatives d’Anadolu d’obtenir une réaction du gouvernement togolais à cette confirmation de la mise en examen du milliardaire français pour corruption au Togo, ont été sans suite.

Alphonse LOGO

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